Pique-nique &
Earth Hour
Aussi appelé "green washing à grande échelle"
April fut donc la première personne à verbaliser ce que pensait Leopold de son colocataire depuis le début de l'année. Comment faisait-il pour le supporter ?
Sans forcément se rendre compte qu'il fronçait les sourcils, il repensa au nombre de fois où il avait pris sur lui pour ne pas lui hurler de dégager de son espace vital. Pour ne pas balancer les affaires du blond par dessus la fenêtre. Pour ne pas le dénoncer aux Délégués, de peur que leur attention ne se reporte sur lui par la suite. Pour ne pas se barrer de leur chambre en claquant la porte, et se barrer de la Hampton par la même occasion.
Il ferma les yeux, et passa un coup de langue distrait et agacé à la fois sur ses lèvres. Il ne savait pas comment il faisait pour tenir, mais il devait le faire. Point.
Il marmonna une réponse simple, les yeux toujours fermés : « Bah… C'est pas comme si on passait notre vie ensemble… Si je me débrouille bien je peux ne le voir qu'au moment du coucher et du lever. Mais c'est clair, c'est déjà trop », conclut-il finalement, une moue contrite sur le visage.
Le moment exact au cours duquel Leopold rouvrit les yeux fut également celui que choisit un délégué (son prénom échappait à Leopold… était-ce Percy ? Pete ?) pour harponner le principal trouble-fête, et ami supposé de Léonard. De là où les deux Élites étaient assis, ils ne purent bien évidemment pas entendre le court dialogue qu'il y eut entre les deux garçons ; cela n'empêcha en rien April d'applaudir et d'approuver à voix haute l'action du délégué. Amusé par April, mais surtout désireux de conserver la confiance apparemment aveugle qu'elle semblait lui porter, il se surprit à lui aussi claquer des mains. Ils furent d'ailleurs rejoints par d'autres Élites et quelques Bourgeois, d'abord timidement, puis franchement.
Et voilà, voilà comment on humiliait publiquement quelqu'un tout en faisant à savoir à tout le monde que l'on approuvait les Délégués. Leopold n'était ni fier ni honteux de cela, de cette hypocrisie généralisée, d'obéir à cette domination incontestée. Il n'avait ni la force, ni l'envie de se dresser contre ça ; et si les Délégués commençaient à l'avoir dans leur objectif, il valait mieux pour lui qu'il leur montre patte blanche publiquement pour ne pas risquer d'autres… représailles que leur bouquet.
Non, ni fier ni honteux ; il n'avait pas à être l'un ou l'autre. Il était juste normal. Et alors qu'il se faisait cette réflexion, il lui sembla croiser furtivement le regard émeraude de son camarade de chambrée. Fugace éclair vert, qui se détourna bien vite des yeux marrons du Year 13. Peut-être était-ce une coïncidence, un échange de regard non désiré comme il nous en arrive tant chaque jour. Ou peut-être que le blond avait cherché son regard ? Peut-être avait-il voulu vérifier que… Que quoi ? Que Leopold était bien là ? Qu'il traînait bien avec les Délégués ? Que voulait dire ce regard, s'il voulait dire quoi que ce soit ? « Je sais que tu es là » ? « Je sais qui tu es » ? « Je te juge » ?
Après les applaudissements, le délégué invectiva la foule suspendue à ses lèvres, comme des croyants à celles du messie, et annonça le programme de la suite de la soirée : un poétique (et sûrement pas très écologique) lancer de lanternes lumineuses. April fit bien évidemment partie des premières personnes à réagir ; et bien sûr, l'idée l'en-chan-tait.
Elle s'était relevée d'un bond, et tendait maintenant une main fine, blanche et parfaitement manucurée à Leopold. Il fut comme parcouru par un frisson d'horreur lorsqu'il comprit qu'elle voulait l'aider à se relever, et non simplement lui faire admirer ses doigts parfaits de golden-girl. Luttant contre lui-même, il lui donna sa main, qui tremblait légèrement, espérant que sa grimace de dégoût passerait plus ou moins inaperçue, se confondant avec l'effort qu'il devait fournir pour se redresser.
Lorsque sa main froide entra en contact avec la peau chaude, douce et moite à la fois de la jeune fille, son corps entier se crispa, et il se fit violence pour ne pas lui crier de dégager, de le lâcher, lui hurler qu'il n'en avait rien à foutre de ses sourires charmeurs et de sa soi-disant amitié. Pourquoi les gens voulaient-ils à ce point le toucher, le mettre hors de lui, le faire sortir de ses gonds, le faire se dévoiler ? Pourquoi faisaient-ils semblant de vouloir être proche de lui, de vouloir l'aider ? Il les détestait tous, et ils le lui rendaient bien, malgré ce qu'ils lui disaient, alors pourquoi continuer à faire semblant ? Pourquoi le monde entier lui voulait-il du mal en permanence ?
Son masque se fissura, son sourire policé s'évanouit alors qu'il se tenait désormais face à la jeune femme. Son visage n'était plus qu'agressivité, l'agressivité des animaux blessés qui se sentent mourir, l'agressivité de ceux qui n'ont plus que ça pour masquer leur peur.
Il se détourna d'elle, et puisant dans les dernières ressources d'hypocrisie et de mensonge qu'il lui restait, baragouina de vagues excuses.
« Je… Suis un peu fatigué. Je m'excuse, tu vas devoir trouver quelqu'un d'autre. Passe une bonne soirée. »
Il s'éloigna d'un pas alerte, laissant la demoiselle en plan. Il voulait être seul, rentrer chez lui… Il voulait qu'on le laisse tranquille, une bonne fois pour toutes. Il en avait marre d'être Leopold Stern, qui était l'ami de tous et de personne, le colocataire d'un type irresponsable et soucieux à la fois, le confident d'une jeune fille futile et capricieuse et le fils d'un… Banquier. Connard. Enfoiré. Suicidaire. Suicidé. Il en avait marre de Leopold Stern, qui ne savait pas qui il était, qui ne savait pas ce qu'il voulait, qui ne savait pas agir autrement que par peur ou par intérêt.
Sans forcément se rendre compte qu'il fronçait les sourcils, il repensa au nombre de fois où il avait pris sur lui pour ne pas lui hurler de dégager de son espace vital. Pour ne pas balancer les affaires du blond par dessus la fenêtre. Pour ne pas le dénoncer aux Délégués, de peur que leur attention ne se reporte sur lui par la suite. Pour ne pas se barrer de leur chambre en claquant la porte, et se barrer de la Hampton par la même occasion.
Il ferma les yeux, et passa un coup de langue distrait et agacé à la fois sur ses lèvres. Il ne savait pas comment il faisait pour tenir, mais il devait le faire. Point.
Il marmonna une réponse simple, les yeux toujours fermés : « Bah… C'est pas comme si on passait notre vie ensemble… Si je me débrouille bien je peux ne le voir qu'au moment du coucher et du lever. Mais c'est clair, c'est déjà trop », conclut-il finalement, une moue contrite sur le visage.
Le moment exact au cours duquel Leopold rouvrit les yeux fut également celui que choisit un délégué (son prénom échappait à Leopold… était-ce Percy ? Pete ?) pour harponner le principal trouble-fête, et ami supposé de Léonard. De là où les deux Élites étaient assis, ils ne purent bien évidemment pas entendre le court dialogue qu'il y eut entre les deux garçons ; cela n'empêcha en rien April d'applaudir et d'approuver à voix haute l'action du délégué. Amusé par April, mais surtout désireux de conserver la confiance apparemment aveugle qu'elle semblait lui porter, il se surprit à lui aussi claquer des mains. Ils furent d'ailleurs rejoints par d'autres Élites et quelques Bourgeois, d'abord timidement, puis franchement.
Et voilà, voilà comment on humiliait publiquement quelqu'un tout en faisant à savoir à tout le monde que l'on approuvait les Délégués. Leopold n'était ni fier ni honteux de cela, de cette hypocrisie généralisée, d'obéir à cette domination incontestée. Il n'avait ni la force, ni l'envie de se dresser contre ça ; et si les Délégués commençaient à l'avoir dans leur objectif, il valait mieux pour lui qu'il leur montre patte blanche publiquement pour ne pas risquer d'autres… représailles que leur bouquet.
Non, ni fier ni honteux ; il n'avait pas à être l'un ou l'autre. Il était juste normal. Et alors qu'il se faisait cette réflexion, il lui sembla croiser furtivement le regard émeraude de son camarade de chambrée. Fugace éclair vert, qui se détourna bien vite des yeux marrons du Year 13. Peut-être était-ce une coïncidence, un échange de regard non désiré comme il nous en arrive tant chaque jour. Ou peut-être que le blond avait cherché son regard ? Peut-être avait-il voulu vérifier que… Que quoi ? Que Leopold était bien là ? Qu'il traînait bien avec les Délégués ? Que voulait dire ce regard, s'il voulait dire quoi que ce soit ? « Je sais que tu es là » ? « Je sais qui tu es » ? « Je te juge » ?
Après les applaudissements, le délégué invectiva la foule suspendue à ses lèvres, comme des croyants à celles du messie, et annonça le programme de la suite de la soirée : un poétique (et sûrement pas très écologique) lancer de lanternes lumineuses. April fit bien évidemment partie des premières personnes à réagir ; et bien sûr, l'idée l'en-chan-tait.
Elle s'était relevée d'un bond, et tendait maintenant une main fine, blanche et parfaitement manucurée à Leopold. Il fut comme parcouru par un frisson d'horreur lorsqu'il comprit qu'elle voulait l'aider à se relever, et non simplement lui faire admirer ses doigts parfaits de golden-girl. Luttant contre lui-même, il lui donna sa main, qui tremblait légèrement, espérant que sa grimace de dégoût passerait plus ou moins inaperçue, se confondant avec l'effort qu'il devait fournir pour se redresser.
Lorsque sa main froide entra en contact avec la peau chaude, douce et moite à la fois de la jeune fille, son corps entier se crispa, et il se fit violence pour ne pas lui crier de dégager, de le lâcher, lui hurler qu'il n'en avait rien à foutre de ses sourires charmeurs et de sa soi-disant amitié. Pourquoi les gens voulaient-ils à ce point le toucher, le mettre hors de lui, le faire sortir de ses gonds, le faire se dévoiler ? Pourquoi faisaient-ils semblant de vouloir être proche de lui, de vouloir l'aider ? Il les détestait tous, et ils le lui rendaient bien, malgré ce qu'ils lui disaient, alors pourquoi continuer à faire semblant ? Pourquoi le monde entier lui voulait-il du mal en permanence ?
Son masque se fissura, son sourire policé s'évanouit alors qu'il se tenait désormais face à la jeune femme. Son visage n'était plus qu'agressivité, l'agressivité des animaux blessés qui se sentent mourir, l'agressivité de ceux qui n'ont plus que ça pour masquer leur peur.
Il se détourna d'elle, et puisant dans les dernières ressources d'hypocrisie et de mensonge qu'il lui restait, baragouina de vagues excuses.
« Je… Suis un peu fatigué. Je m'excuse, tu vas devoir trouver quelqu'un d'autre. Passe une bonne soirée. »
Il s'éloigna d'un pas alerte, laissant la demoiselle en plan. Il voulait être seul, rentrer chez lui… Il voulait qu'on le laisse tranquille, une bonne fois pour toutes. Il en avait marre d'être Leopold Stern, qui était l'ami de tous et de personne, le colocataire d'un type irresponsable et soucieux à la fois, le confident d'une jeune fille futile et capricieuse et le fils d'un… Banquier. Connard. Enfoiré. Suicidaire. Suicidé. Il en avait marre de Leopold Stern, qui ne savait pas qui il était, qui ne savait pas ce qu'il voulait, qui ne savait pas agir autrement que par peur ou par intérêt.
- HRP:
- Désolée, c'est long. J'espère que j'ai pas trop perdu la main vu que c'était mon premier post depuis longtemps x.X