'Cass'-toi, tu vas ruiner ma toile ! || Cassandre Duvernay

Physique & Caractère

Ses cheveux ne sont pas parfaitement lissés, quelques ondulations timides sont encore visibles, son maquillage date clairement de la veille, ses doigts aux ongles courts abordent encore la teinte bleutée de l'encre de chine qu'elle a utilisée lundi matin et ses vêtements enfilés à l'arrache laisse clairement présagé qu'elle n'a pas beaucoup dormi, troquant quelques heures de sommeil pour quelques heures de passion, quelques heures durant lesquelles elle avait sans doute peint une nouvelle toile, à moins qu'elle n'est passée la nuit à corriger les travaux de ses élèves. Personne ne le sait, tout le monde sans moque. Elle est belle, Madame Duvernay, malgré ses traits juvéniles et ses cheveux mal lissés, on en oublie presque les traces bleus sur ses doigts. Elle a une certaine prestance, Madame Duvernay, c'est une force tranquille, elle impose le respect par son calme, lisible en tout temps sur son doux visage. Ses yeux verts, ils scrutent l'âme en profondeur, comme si un simple regardé posé sur une personne lui permettait d'en connaître tout les secrets. Ses vêtements, aux couleurs neutres, ne donnent aucun indice sur sa personnalité, ne laissent rien imaginer, elle est neutre, elle aime ça. Sur son petit nez retroussé, il est parfois possible d'y voir de fine lunette noire, lunette qu'elle ne porte qu'au moment de peindre, pour mieux voir les détails de son œuvre. Lorsqu'on la croise dans les rues de la ville, avec son bonnet rouge pour les temps froids ou avec sa casquette noire pour les temps chaud, il n'est pas rare de l'apercevoir avec une immense pochette orange, qu'elle trimbale partout avec elle. Dans cette pochette, où se réunissent papiers volages et crayons, il y a aussi son portfolio personnel, qu'elle ne montre que rarement, pour ne pas dire jamais, gardant jalousement son art, sa propre personne comme seule critique.

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Douce et passionnée; deux mots qui la décrivent bien au quotidien. Cassandre, c'est une femme timide et renfermée, qui élève rarement la voix et qui profite de chaque moment de silence pour se ressourcer, pour retrouver ce calme qu'elle a peu à peu perdue, à mesure que le bruit s'intensifiait. Malgré sa hantise des bruits sourds et constants, elle adore la musique. Pour elle, il n'y a rien de mieux que de travailler avec une bonne musique comme accompagnatrice, bougeant son pinceau au rythme de la chanson, peignant avec l'émotion qu'elle lui insuffle, renforçant cette passion, déjà bien intense, qu'elle éprouvait vis-à-vis de l'art.

Têtue et boudeuse ; deux mots qui la décrivent bien dans la sphère privée de sa vie. Si elle est calme et avenante, Cassandre est aussi une femme têtue qui apprécie avoir le dernier mot, qui aime gagner des débats. Lorsque cela arrive, il n'est pas rare que la jeune femme se permette une petite danse de la victoire, avant de se rasseoir, deux ou trois enchaînement plus tard. En cas de défaite, elle se révèle comme étant très peu mature, gonflant les joues et tournant le dos, même s'il ne lui suffit généralement que de quelques minutes avant que tout ne redevienne à la normale, sa défaite ne devenant qu'un nouveau prétexte pour débuter une nouvelle conversation, plus riche encore en arguments et en explications plus ou moins bien détaillée.

Maladroite ; son deuxième prénom. Depuis sa tendre enfance, la jeune femme se révèle comme étant incapable de ne pas tout faire tomber. Elle ne comptait plus le nombre de fois où elle avait pris une gorgée de l'eau souillée qu'elle utilisait pour rincer ses pinceaux, confondant le verre d'eau avec son thé ou sa limonade ou alors le nombre de fois où elle avait foncé dans des inconnus, parce que trop distraite pour regarder en avant d'elle comme il se doit. Sa maladresse, bien que parfois comique, avait même parfois conduit à quelques blessures, comme cette fois où elle était tombée en bas d'une montagne de neige, se fracturant un doigt sans vraiment comprendre comment elle avait pu y arriver, la montagne de neige n'étant en réalité qu'un monticule de moins d'un mètre de haut.

Histoire

Elle le savait, s'en était toujours douté, mais avait toujours conservé un peu d'espoir, un peu d'espoir vain, car elle ne pouvait pas concevoir qu'après quatre année d'amour, de tendresse et de promesses, qu'il puisse la tromper. Si au départ, elle cherchait à nier l'évidence, le sac à main et les coupes de vin vide près du canapé ne trompaient pas. D'ailleurs, les bruits provenant de l'étage était tout aussi révélateur que la marque de rouge à lèvres sur ce verre qu'elle tenait maintenant entre ses mains. Ses doutes maintenant fondés, elle monta lentement les marches qui la conduiraient à leur chambre, là où elle les verrait, celui qu'elle aimait et celle qu'elle présumait être une pure inconnue. Si seulement, ça avait été une inconnue... Lorsqu'elle poussa la porte restée entrebâillée, la vision qui s'offrit à elle lui fit plus mal que n'importe quel coup physique. Devant elle, dans ce lit, dans son lit, son fiancé et sa sœur, sensuellement entrelacée, la fixaient de leur regard surpris. Son monde, jusqu'alors tremblant d'un précaire équilibre, s'effondra. Elle était en colère, elle aurait aimé leur hurler de partir, frapper Jakob, renié sa jumelle, mais elle ne dit rien, tant la douleur était grande. Ils tentèrent de s'expliquer, mais leurs paroles étaient vaines, elle n'entendait rien d'autre que le son de son cœur qui se brisait, s'effritait. Ils finirent par comprendre, ils finirent par partir, la laissant là, au milieu de cette chambre, au milieu de cette maison, son nid d'amour détruit. Après avoir versée plus de larmes qu'elle n'aurait dû, plus déterminée qu'elle ne l'avait jamais été, elle fit ses valises, ne prenant avec elle que le strict minimum : des vêtements, sa trousse de toilette, la totalité de ses albums de famille et son chien, un grand danois d'un an, baptisé Spike.


Elle savait parfaitement où elle allait, elle savait parfaitement où cette route sinueuse l'entraînerait, loin de la France, loin de sa sœur et de son ex fiancé. Avant de quitter cette maison qu'elle avait achetée avec Jakob il y a moins d'un an, elle retira sa bague de fiançailles, coupant officiellement tout lien avec cette ancienne vie qu'elle quittait maintenant. C'est à l'aéroport qu'elle fut prise de remords, car si elle en voulait à sa jumelle et à son ancien fiancé, ses parents et son petit frère, qui n'avaient rien à voir avec cette histoire, ne méritaient pas de s'inquiéter pour elle. Un coup de fil passé, quelques larmes versées et la voilà prête, son sac contenant son ordinateur, en bandoulière sur son épaule, son passeport et son billet d'embarquement en main ainsi que cette lettre, cette lettre qu'elle avait d'abord eu l'intention de brûlé lorsqu'elle l'avait reçue. Cette lettre, c'était une lettre de cette prestigieuse école, la Hampton Academy, celle où elle avait étudié il y a quelques années, alors qu'elle était encore au lycée. Ces années-là, bien qu'elles furent rudes et particulièrement difficiles au niveau scolaire, furent de loin les plus belles années de sa vie, c'était d'ailleurs là-bas, dans le fond de l'atelier d'arts, les doigts pleins de peinture, qu'elle avait décidée de devenir professeur d'arts plastiques. Ce rêve, il était né grâce à un professeur. Lui, là où tous voyaient une future artiste, suivant le chemin que sa mère avait elle aussi empruntée, il voyait une âme dévouée, une jeune femme passionnée qui avait tant à apprendre aux autres, une personne amicale, il voyait en elle une future professeure, il voyait en elle sa relève. Peu à peu, à coup de belles paroles et de mots d'encouragements, il l'avait convaincue, elle voulait être comme lui, elle voulait inspiré ses élèves, elle voulait leur apprendre quelque chose, transmettre quelque chose. La jeune femme avait enfin trouvé un mentor, quelqu'un prêt à l'aider pour accomplir son rêve, malheureusement pour elle, le jour de son rapatriement arriva, elle avait terminé le lycée. Si elle avait d'abord été en colère le jour où ses parents l'avaient envoyés ici dans le but de renforcer son anglais et, profitant de l'occasion, montrer que son père avait beaucoup d'argent.


Ce rêve, elle l'avait accomplie et c'est l'année même où elle avait enfin reçue son diplôme universitaire qu'elle avait envoyée pour la première fois sa candidature. Les trois premières années, elle avait entretenue cet espoir d'être sélectionnée, mais elle avait rapidement abandonnée, envoyant sa candidature par pur principe les années qui suivirent. Cette année-là n'avait pas fait exception à la règle, mais cette année, quelque chose avait changé. Cette année, elle avait reçu une réponse, positive de surcroît. Si elle avait été heureuse au départ, l'image de Jakob s'était rapidement imposée à son esprit et c'est, piteusement, qu'elle avait rangée cette lettre au fond de son sac. Jakob, elle l'avait toujours aimée, c'était ce genre de garçon charismatique qui avait tout pour plaire et qui plaisait. Pour elle, la petite fille timide et renfermée, c'était presque inespérée qu'un homme comme elle s'intéresse à sa petite personne. Pourtant, passant par-dessus ce manque de confiance en elle, elle avait accepté son invitation à sortir et il était tombé amoureux d'elle. Malgré ce qu'elle avait vue plutôt, elle restait convaincue que quelque part, bien au fond de lui, caché entre ses vices et ses défauts, une petite parcelle de lui l'aimait, qu'une petite parcelle de lui était sincère, le jour où il lui avait demandé de passer sa vie avec lui. Si Jakob était un homme aimant et protecteur, il n'en restait pas moins vieux jeu, convaincu qu'une femme devait rester à la maison pour pondre des enfants et s'en occuper. C'était à force de disputes et de vaines batailles qu'elle avait enfin réussit à le convaincre de la laisser travaillée à mi-temps comme professeure suppléante. Alors le convaincre de la laisser partir à Londres ? C'était peine perdue, elle n'aurait rien récolté de plus que des pleur et peut-être même un poignet enflé d'avoir été trop serré. Cette séparation, c'était comme un renouveau pour elle, c'était comme une libération, elle retournait enfin en Angleterre, après tant d'années loin de ce pays qui avait été le sien tout au long de ses études pré-universitaires.


Bien assise dans l'avion, ses écouteurs bien enfoncés dans les oreilles, elle pensait à cette vie qu'elle quittait, à sa sœur, à ses parents. Surtout à ses parents, en réalité. Ces deux-là, c'était comme chien et chat, ils s'aimaient en s'insultant, se détestaient en se disant des mots doux. Leur couple, c'était de ceux qui durent, de ceux dont rêvait Cassandre. Ce genre d'amour, qu'elle avait cru voir dans sa relation avec Jakob, elle leur enviait. Elle aussi voulait être aimée, elle aussi voulait qu'on la prenne dans ses bras pour lui murmurer des mots doux, elle aussi voulait qu'on rigole en lavant la peinture de sa joue, comme son père avait prit l'habitude de le faire avec sa mère, et même si elle n'aimait pas particulièrement son père et cette façon qu'il avait de prendre les gens de haut parce qu'il avait la chance d'être riche, elle devait bien avouer que lui et sa mère c'étaient bien trouvés, même si rien ne les liait au départ. Lorsqu'ils s'étaient rencontrés, son père étudiait déjà en neurochirurgie alors que sa mère tentait vainement de vivre de son art. Il avait aimé sa sensualité et sa passion, elle avait aimé sa virilité et son futur pognon. Elle ne réalisa d'ailleurs son amour pour lui que le jour où elle lui annonça être enceinte, de deux jumelles, de Cassandre et sa sœur. Si elle avait d'abord cru qu'il l'abandonnerait, il l'avait surprise en acceptant, un sourire amoureux sur les lèvres, d'assumer son rôle de père. 7 ans après la naissance des jumelles, leur petit frère naissait enfin, le petit Quentin. Cassandre l'aimait beaucoup, ce petit bout de chou qui lui servait de frère et contrairement à sa sœur, elle n'était pas du tout jalouse du soudain intérêt de ses parents envers le petit. C'est à peu près à l'âge de 12 ans que tout chamboula, que la connexion presque surnaturelle qui unissait Cassandre et Chloé s'éteignit, ne laissant place qu'à une profonde méprise. Chloé, toujours aussi jalouse de son petit frère, s'amusait à lui faire la vie dure, persécutant Quentin qui lui, n'avait même pas encore l'âge de comprendre ce qui se passait. Elle le défendit, son petit frère, s'attirant parfois les foudres de son père parce qu'elle blessait sans le vouloir sa jumelle, mais elle n'en avait que faire, le bonheur de son petit frère était plus important que toutes ses conneries. Au fil des années, sa relation avec son frère ne fit que s'endurcir, alors que celle de Cass' et Clo' ne faisait que dépérir. Palliant cette triste relation avec de bien meilleures, l'artiste avait toujours été bien entourée. Quelques bons amis, le strict minimum, des compagnons de vie pour la plupart, de bons amis éphémères pour les autres.

Lorsque l'avion atterrit enfin et qu'elle récupéra enfin son meilleur ami à pattes, elle parti à la recherche d'un hôtel où dormir, le temps de trouver un appartement convenable qui accepterait un aussi gros chien que Spike. Ces souvenirs douloureux restés quelque part entre la France et l'Angleterre, Cassandre souriait, redécouvrant avec un plaisir mal dissimulé ces quelques rues qu'elle avait l'habitude de dévaler, lorsqu'elle était encore étudiante. Elle était heureuse, elle souriait. Elle se sentait légère, libérée de cette relation qui la pesait depuis quelque temps déjà, ne voyant que maintenant à quel point elle n'était pas heureuse auprès de cet homme qu'elle avait rencontrée dans les couloirs de son université. Leur rencontre avait été causée par la rencontre inusitée du pantalon de Jakob et du repas de Cass', alors qu'elle s'emmêlait les pieds dans les lacets de ses bottes. Quelques excuses plus tard, il lui avait demandé son numéro, qu'elle lui avait donné. Et voilà où elle en était, seule dans ce pays qu'elle aime tant, redécouvrant la vie, chose qu'elle n'avait pas su faire lorsqu'elle était avec Jakob.

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